Notre équipe a partagé en juillet dernier une réflexion via notre infolettre sur l’importance de soutenir le développement des leaders au sein de votre organisation. Aujourd’hui, nous vous proposons de jeter un regard sur l’une des pratiques les plus essentielles à maîtriser pour tout leader souhaitant notamment accéder à un poste de gestion : savoir partager de la rétroaction constructive (qu’on appelle aussi parfois, feedback). Bien que cette pratique peut paraître bien simpliste et accessible, ceux et celles qui en font l’application régulière savent combien elle peut être assez complexe en réalité. Pensez vous-même à certaines expériences récentes où des collègues, des collaborateurs externes ou l’un de vos supérieurs immédiats vous ont personnellement adressé une rétroaction.

Seriez-vous en mesure d’affirmer avec confiance que:

  • Vous saviez exactement sur quoi portait la rétroaction (comportement, geste, attitude, action concrète et observable)?
  • Vous sentiez que cette personne était sincère et directe (pas de détours, de « remplissage de conversation », ou une vague impression qu’on essaie de vous faire comprendre quelque chose)?
  • La rétroaction a généré pour vous une réelle prise de conscience ou l’enrichissement de votre propre connaissance de soi (liée par exemple à une piste de développement, à une qualité personnelle ou à une zone aveugle soudainement mise en lumière)?
  • Le partage de cette rétroaction a permis de renforcer votre relation avec celui ou celle qui en est à l’origine?

Ces quelques questions représentent certains des aspects les plus difficiles à maîtriser dans le partage d’une rétroaction, et conséquemment ceux qui génèrent la construction d’émotions négatives entourant cet exercice (que l’on soit la personne qui offre ou qui reçoit la rétroaction, d’ailleurs!). Mais comment fait-on alors pour offrir une rétroaction constructive, sans cultiver une spirale d’inconfort chez soi et chez l’autre?

 

Problème

Il est normal d’éprouver de la difficulté à exercer habilement cette pratique de la rétroaction constructive. Bien que fondamentales au rôle de gestion, peu de leaders sont dûment formées et accompagnées pour développer cette habileté. L’invitation qui vous est lancée aujourd’hui est de questionner et analyser plus particulièrement la maîtrise qu’ont les gestionnaires de votre organisation de cette compétence, et déterminer s’il s’agit d’une zone de développement généralisée (une majorité de gestionnaires ne maîtrisant pas la compétence) ou d’un besoin ciblé à quelques personnes seulement (une majorité de gestionnaires maîtrisant bien la compétence).

À cet instant précis, vous avez sans doute l’instinct de vous demander : « D’abord, dans notre organisation, qu’est-ce qui définit une personne qui maîtrise parfaitement, beaucoup, assez, un peu ou pas du tout ce savoir-faire? ». Quels comportements, quels gestes et quelles attitudes distinguent chacun des niveaux de compétence? Des éléments de réponse vous viennent probablement en tête à l’instant. Permettez-vous de les noter dès maintenant! Pour soutenir votre réflexion (et peut-être susciter d’autres idées!), nous vous partageons dès maintenant quelques points sur lesquels porter une attention particulière.

Solution

Outre les points en vert proposés ci-dessus, d’autres principes gagnants d’une rétroaction de qualité peuvent se trouver en s’inspirant d’une des théories les plus connues en psychologie, soit la théorie de l’autodétermination de Deci et Ryan (2008)[1]. À travers la loupe de ce modèle théorique, il est possible de comprendre que les êtres humains partagent certains besoins universels fondamentaux. En effet, qu’importe notre appartenance culturelle ou encore les multiples facettes de nos personnalités respectives, nous cherchons tous et toutes à combler professionnellement un besoin d’autonomie, un besoin de compétence et un besoin d’affiliation.

  • Le besoin d’autonomie repose sur le fait d’avoir un pouvoir et une liberté dans l’expression de ses choix et de ses préférences personnelles. Pour qu’une rétroaction constructive puisse permettre de combler ce besoin, il est important de vérifier que l’autre personne est d’abord réceptive à ce qui lui est communiqué et qu’elle sente qu’elle a un certain pouvoir dans l’échange (exemple : le droit de poser des questions, d’avoir des précisions, de ne pas être d’accord, de démontrer sa reconnaissance, etc.). Enfin, elle doit pouvoir ressentir que l’unicité de sa personne est reconnue et accueillie, et qu‘elle peut librement exprimer qui elle est, telle qu’elle est.
  • Le besoin de compétence se caractérise par le désir d’atteindre des objectifs, de se sentir efficace dans ses actions et de maîtriser suffisamment les ressources et les outils nécessaires à l’accomplissement de ses projets. Dans le contexte d’une rétroaction, cela signifie de valider que l’autre comprend très bien à quoi cette rétroaction fait référence afin que l’individu sache quoi en faire concrètement. Par exemple, une personne qui reçoit une rétroaction constructive de son supérieur doit pouvoir avoir confiance qu’elle a les ressources (incluant le soutien de ce dernier!) et les outils pour adapter, corriger ou renforcer le comportement en question. La rétroaction agit ainsi comme un levier de mobilisation et génère un sentiment réciproque que chacun aura bénéficié de la discussion.
  • Le besoin d’affiliation est répondu lorsqu’une personne est en relation positive avec les gens autour d’elle, qu’elle se sent appréciée et connectée aux autres. Pour qu’une rétroaction permette de combler ce besoin, il est clair qu’une attitude bienveillante est de mise, bien qu’il ne faille pas se méprendre par l’évitement d’émotions négatives. En d’autres mots, une relation positive peut être construite sur le partage d’éléments insatisfaisants entre deux personnes – et c’est même un indice de maturité de ladite relation! Si un geste ou un comportement gagne à être corrigé chez une personne, une rétroaction sincère et directe permettra justement à celle-ci de sentir qu’elle est suffisamment importante pour nous, pour que nous abordions même des enjeux inconfortables. En étant spécifiques dans nos propos, en écoutant attentivement, en validant les émotions que cela peut générer chez elle, nous lui démontrons tout notre respect et notre appréciation.

À titre de gestionnaire, il est donc important d’être sensible à la satisfaction de ces besoins, mais aussi de comprendre qu’ultimement, ce sont les besoins de l’AUTRE – et donc sa responsabilité première. Il est tout de même recommandé de demeurer attentif à certains indices en posant au moins une question liée à chaque besoin, laquelle vous permettra d’avoir le pouls réel.

Par exemple:

  • Pour jauger le besoin dautonomie: Comment ma rétroaction résonne pour toi? Qu’est-ce qui fait écho plus particulièrement dans ce que je viens de nommer? Y a-t-il des éléments que tu perçois différemment ? Peux-tu m’aider à comprendre ta perspective sur … (tel élément discuté)?
  • Pour jauger le besoin de compétence: Avec ce que je viens de te partager, te sens-tu en mesure de … (corriger, développer ou renforcer) … (tel comportement ou telle attitude)? Lorsque la situation se reproduira, comment te vois-tu adresser les choses différemment? Quel soutien aimerais-tu recevoir de ma part (ou d’autres) en lien avec le défi (ou l’enjeu) discuté?
  • Pour jauger le besoin d’affiliation: Comment te sens-tu à la suite de notre discussion? C’est important pour moi que tu saches combien tu es apprécié(e), le sais-tu (être très attentif au non verbal ici…).

 

En conclusion

Pour d’autres conseils ou pour un accompagnement permettant de soutenir le développement de cette compétence clé, n’hésitez pas à faire appel à notre équipe. Que ce soit par l’entremise de conseils rapides, d’un atelier de formation sur le sujet ou encore d’une démarche de coaching personnalisée pour parfaire son niveau d’habileté, nous sommes là pour faire de toute situation de rétroaction, une opportunité mobilisatrice!

 

Article rédigé par Fannie Barrette, M.Sc., D.Ps. (candidate)

Consultante en psychologie organisationnelle

 

 

[1] Deci, E. L., & Ryan, R. M. (2008). Facilitating optimal motivation and psychological well-being across life’s domains. Canadian Psychology, 49, 14–23.

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